L’an dernier, vous avez passé les fêtes en famille, avec votre mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer. Lors du repas de Noël, celle-ci a fait une crise mêlant angoisse et agressivité, au point d’effrayer vos enfants et de gâcher la fête. Vous vous inquiétez à l’approche de la fin d’année : comment éviter que cela se reproduise ?
Pour de nombreuses familles en France, passer les fêtes avec un proche Alzheimer peut réveiller chez lui des émotions intenses : agitation, refus, confusion, crises soudaines, pleurs, fatigue extrême. En lisant cet article, vous comprendrez pourquoi Noël perturbe autant les personnes malades, quelles situations critiques reviennent presque chaque année, et surtout comment gérer Alzheimer pendant les fêtes.
Pourquoi Noël est un moment difficile pour les personnes Alzheimer
Comprendre le comportement d’un proche atteint de la maladie d’Alzheimer à Noël est essentiel pour pouvoir le gérer. Ce qui sort de l’ordinaire bouscule le mode de vie des malades et les repères dont les personnes dépendantes ont besoin pour se sentir en sécurité.
Trop de stimulation (bruit, lumières, mouvements)
Les décorations, la musique, les conversations à plusieurs, les rires et éclats de voix enjoués… Pour un malade d’Alzheimer, cela crée une surcharge sensorielle difficile à supporter. Le cerveau ne parvient plus à filtrer les informations ni à les replacer dans un cadre connu et rassurant : le moindre mouvement peut devenir une menace, une lumière un danger, un bruit une agression.
Cela peut générer de l’agitation, une confusion, l’envie de s’isoler, ou au contraire des réactions vives de défense contre ce qui peut être considéré comme une agression.

Changement de repères : autre lieu, autre rythme
La maladie d’Alzheimer rend chaque changement difficile. Or les fêtes de Noël sont souvent l’occasion de plusieurs changements du rythme de vie :
- Un lieu différent : le repas ou la réunion peut se tenir ailleurs que d’habitude, par exemple un résident d’EHPAD passant Noël chez ses enfants.
- Un rythme modifié : horaires de repas décalés, réveillon tardif ou déjeuner avancé.
- Des invités inhabituels : nombre et visages différents peuvent désorienter la personne.
Tout ceci rompt la routine rassurante du quotidien et peut provoquer une grande anxiété.
Pression émotionnelle et fatigue rapide
Familiale, la fête de Noël réveille des souvenirs : certains sont agréables, d’autres plus durs à vivre, comme les pertes d’êtres chers, les fâcheries, etc. De plus, l’atteinte de la mémoire par la maladie d’Alzheimer peut mettre la personne âgée en situation inconfortable : elle peut se sentir perdue, ne plus se souvenir ni reconnaître telle ou telle personne de son entourage.
Ces multiples émotions sont difficiles à gérer et peuvent la fatiguer rapidement. Cette fatigue cognitive, très fréquente dans la maladie d’Alzheimer, augmente l’agitation et le risque de crise.
3 raisons pour lesquelles Noël désoriente davantage
- Trop de stimulations sensorielles en peu de temps
- Rupture des repères liés au mode de vie habituel
- Forte charge émotionnelle (joie, nostalgie, incompréhension)
Les 9 situations qui déstabilisent les familles (et comment les éviter)
Voici les situations les plus courantes lors des fêtes avec qui peuvent déstabiliser une personne Alzheimer, et comment les gérer.
1. Les réunions trop nombreuses
Cause : Trop de monde, trop de conversations simultanées, trop souvent pendant les fêtes.
Signes d’alerte : agitation, regard fuyant, mains crispées, demande de repartir, isolement.
Solution : Accueillir la personne dans un lieu calme, limiter les groupes, prévoir pour elle des interactions simples, avec une ou deux personnes seulement.
Phrase prête à l’emploi : « Viens avec moi, on va aller se poser dans un endroit plus calme. »
2. Les réunions trop nombreuses
Cause : Un repas de 2 ou 3 heures est impossible à gérer pour un malade Alzheimer.
Signes d’alerte : refus de manger, irritabilité, impossibilité de rester assis, agitation croissante.
Solution : Servir la personne en premier, prévoir une pause, lui permettre de se retirer, l’encourager à faire une sieste pendant que les convives continuent leur ripaille.
Phrase à utiliser : « Tu peux te lever quand tu veux, je t’accompagne, d’accord ? »
3. Les souvenirs demandés trop directement
Cause : Les questions comme « Tu te souviens de… ? » créent une pression et réveillent l’angoisse du malade qui en a perdu la mémoire.
Signes d’alerte : silence, frustration, larmes, agitation.
Solution : Parler au présent, ne pas évoquer de souvenirs du passé, ou seulement sans insister.
Phrase clé : « J’aimerais te montrer ces photos, elle me fait penser à un beau moment. »
4. Les cadeaux incompris ou non adaptés
Cause : Offrir un objet complexe ou non reconnu par le malade perturbe sa compréhension et risque de le mettre une nouvelle fois en échec.
Signes d’alerte : Malaise, rejet du cadeau, incompréhension.
Solution : Opter pour un cadeau sensoriel, simple, rassurant, appartenant à son univers de vie actuel.
Phrase : « Ce cadeau est pour ton confort, j’espère qu’il te fera du bien. »
5. L’agitation en soirée
Cause : En fin de journée, les capacités cognitives diminuent et les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer présentent alors une forte anxiété.
Signes d’alerte : agitation, envie de « rentrer chez soi », propos incohérents.
Solution : Dispenser la personne âgée de participer à une réunion familiale, organiser celle-ci le midi, éviter les lumières fortes, réduire le bruit.
Phrase aidant : « Je vois que tu es fatigué, on va se reposer un peu ensemble. »
6. Le refus de participer
Cause : Peur, fatigue, incompréhension du contexte : une réunion, un repas avec de nombreuses personnes même familières, peut apparaître comme un défi trop difficile à relever.
Signes d’alerte : refus verbal et/ou physique de participer, anxiété, refus de s’habiller, agitation croissante.
Solution : Ne pas forcer, proposer une alternative douce : faire venir dans sa chambre ou dans une autre pièce, les invités un par un ; dispenser la personne de participer.
Phrase : « Si tu préfères, on fait une petite visite plus tard, juste toi et moi. »
7. Les absences de proches disparus
Cause : Les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer oublient parfois que telle ou telle relation est décédée, et pensent qu’elle est toujours en vie, regrettant même qu’elle ne soit pas présente.
Signes d’alerte : répétition des questions, tristesse, confusion, énervement face à une absence de réponse.
Solution : Ne jamais rappeler la mort frontalement. Évoquer l’impossibilité de la personne disparue d’être présente pour telle ou telle raison.
Phrase : « Il ne peut pas venir aujourd’hui, mais on pense très fort à lui. »
8. Les déplacements (voiture, long trajet)
Cause : Les fêtes sont l’occasion d’aller visiter des parents, parfois au terme d’un long trajet. Or le voyage casse les repères de la personne Alzheimer et peut déclencher un fort stress.
Signes d’alerte : anxiété, agitation, propos « je veux rentrer ».
Solution : Trajet court, pauses, explications détaillées du but du déplacement, musique familière, objet rassurant (une couverture par exemple).
Phrase clé : « On arrive bientôt, tu es en sécurité avec moi. »
9. Les conflits familiaux autour de la prise en charge
Cause : Il n’est pas rare que dans une famille, tous les membres ne soient pas d’accord sur les solutions de prise en charge du parent atteint de la maladie d’Alzheimer. Maintien à domicile, hébergement chez l’un ou l’autre de ses enfants, EHPAD, UVP… les réunions familiales peuvent être l’occasion de revenir sur ces désaccords de façon plus ou moins vire.
Signes d’alerte : tension visible, malaise, propos agressifs vis-à-vis de tel ou tel membre de la famille, cris, larmes
Solution : Éloigner la personne, reporter les discussions.
Phrase : « On parle de ça plus tard, profitons de ce moment tous ensemble. On t’aime. »
Comment organiser un Noël vraiment apaisé avec Alzheimer
Voici les clés pour offrir à un parent présentant d’importants troubles cognitifs et du comportement des fêtes de Noël les plus apaisées et sereines possibles.
Garder le rythme habituel : repas, sieste, coucher
Chez les personnes âgées désorientées, la stabilité est rassurante : conserver les mêmes repères temporels est essentiel pour leur bien-être. Il faut donc veiller à respecter ses habitudes : mêmes temps de lever, de repas, de coucher, et pratique d’activités connues dans la journée.
Il est préférable d’éviter de réveillonner tard dans la nuit du 24 décembre, ou de ne pas convier la personne âgée qui se couchera à la même heure que d’habitude.
Le jour de Noël, l’idéal est d’organiser un repas familial au domicile des proches hébergeant la personne âgée pour l’occasion. Ainsi, pas de déplacement ni de perte de repère spatial. Sa participation au repas pourra être allégée, en fonction de ses réactions.
Prévoir un espace calme dans la maison
Afin de prémunir votre proche d’une surcharge sensorielle, il est préférable de disposer d’une pièce où celui-ci pourra se réfugier. Une chambre, un bureau, à l’écart du bruit et de l’agitation sont un refuge où le malade peut retrouver son calme et/ou faire la sieste.

Simplifier : petites visites, moments courts
Les grands repas, les réunions avec beaucoup de monde, les visites chez des membres de la famille sont autant de défis auxquels le senior malade n’a pas toujours les capacités de faire face.
Il vaut mieux organiser des sessions courtes et éviter les réunions trop peuplées. La personne âgée pourra par exemple participer à un déjeuner pendant moins d’une heure puis aller se reposer dans une pièce calme, effectuer de rares visites brèves chez des proches.
Anticiper les situations difficiles pour la personne Alzheimer
En ayant identifié toutes les occasions qui peuvent générer du stress, de la détresse, de la sur-anxiété accompagnée d’agressivité chez le malade, il s’agit de :
- Chercher à les éviter en les désamorçant,
- Ou de réagir immédiatement en cas de crise : parler lentement, limiter les stimuli, proposer un retrait temporaire…
Organisation type d’un Noël apaisé
- Début de la fête en fin de matinée, jamais le soir.
- Petit groupe de proches, interactions « 1-to-1 ».
- Pause après 30 à 45 minutes selon la fatigue de la personne âgée.
- Repas court, dessert plus tard, par exemple en goûter.
- Retour au calme immédiat si signes d’agitation.
Comment expliquer Alzheimer aux enfants ou proches éloignés
Pour des enfants, le spectacle d’un grand-parent désorienté et en crise, agressif ou pleurant, peut être assez traumatisant. Il convient de les aider à mieux comprendre les raisons de ce comportement sans inquiétude.
Dire juste l’essentiel, sans dramatiser
Avant de recevoir votre parent, une petite explication à vos enfants, ainsi qu’à des membres de la famille éloignée est nécessaire. Il faut expliquer clairement la situation, avec des mots simples, par exemple :
« Mamie a une maladie qui fait que son cerveau mélange les souvenirs. ». On peut également faire comprendre que le senior n’est plus lui-même lorsqu’il a des « crises », que c’est la maladie qui prend le contrôle de son cerveau. Et insister sur le fait que même malade, il est toujours quelqu’un que vous aimez beaucoup.
Donner des consignes simples : parler doucement, phrases courtes
Une fois posées les bases de la maladie, il est judicieux de donner des « outils » pour interagir avec le proche :
- Parler doucement,
- Faire des phrases courtes,
- Ne pas poser de questions sur le passé ni sur la maladie,
- Faire montre de tendresse.
Autant d’éléments pour une bonne communication avec la personne Alzheimer.
Encourager les interactions sécurisantes
Afin de ne pas perturber le parent atteint d’Alzheimer, il faut demander aux enfants comme aux personnes peu habituées à rencontrer cette maladie :
- De l’écouter avec empathie,
- De parler d’une seule chose à la fois, pour permettre la concentration,
- De ne jamais critiquer,
- De ne pas « rectifier » la réalité si la personne se trompe, oublie, parle de personnes disparues comme si elles étaient en vie.
Et si votre proche refuse de venir ou de participer ?
Il n’est pas impossible que la personne Alzheimer décline votre invitation à participer aux festivités de Noël. Ne sur réagissez pas, adoptez plutôt une attitude bienveillante et compréhensive.
Comprendre les raisons : peur, fatigue, désorientation
Le refus de votre proche est un message, pas une opposition. Il est vraisemblable qu’il se projette dans ce que pourraient être ces festivités et qu’il ne se sente pas capable d’affronter sa famille et ses proches : la honte de se présenter dans un état dégradé par la maladie, la peur de ne pas être « à la hauteur », la crainte de « faire des siennes » devant de nombreuses personnes, la difficulté de se retrouver en nombreuse compagnie…
Comment réagir sans culpabiliser
Face à ce refus, il est possible d’argumenter. Si toutefois, la personne âgée ne veut rien entendre, il ne faut pas insister au risque de la culpabiliser et de renforcer son angoisse et son stress.
Solutions alternatives : visite courte, repas à domicile, moments en duo
Il est possible de proposer des solutions alternatives, plus légères, que votre parent serait en mesure d’accepter :
- Un petit repas à domicile, sans convoquer toute la famille,
- Une visite courte,
- De petits moments à deux avec, à chaque fois, un membre de la famille…
En résumé : 10 conseils simples pour un Noël plus serein
- Réduire les stimulations : pas trop de monde, pas d’environnement bruyant
- Préserver le rythme habituel : privilégier un repas ou une réunion le midi
- Organiser un ou des moments de fête courts
- Éviter les questions pièges : souvenirs, proches disparus,…
- Choisir des cadeaux simples
- Avancer l’horaire de fête
- Préparer un espace refuge au calme
- Anticiper les moments difficiles et penser à des solutions
- Rester toujours flexible et à l’écoute
- Expliquer aux enfants comment communiquer avec le parent Alzheimer
FAQ
Pourquoi Noël est-il difficile pour les personnes Alzheimer ?
À cause de la surcharge sensorielle, du changement de repères et de la fatigue émotionnelle. Les fêtes perturbent leur stabilité.
Comment gérer une crise ou agitation pendant les fêtes ?
Isoler la personne Alzheimer dans un endroit calme, parler doucement et réduire les stimuli jusqu’à ce que la personne se stabilise.
Que faire si une personne Alzheimer refuse de venir à Noël ?
Ne pas la forcer : proposer une alternative plus simple, une visite courte ou un moment en duo.
Comment protéger une personne Alzheimer de la surcharge sensorielle ?
Limiter le bruit, créer un espace refuge, éviter les lumières fortes et les groupes nombreux.
Quels cadeaux offrir à une personne Alzheimer ?
Des cadeaux simples, sensoriels, rassurants : plaid, coussin, album photos, musique.
Comment préparer les enfants à voir un proche Alzheimer ?
Expliquer avec des mots simples et donner des consignes claires.
Peut-on organiser Noël dans un EHPAD ?
Oui, beaucoup d’EHPAD organisent des temps festifs adaptés et sécurisés.
Comment gérer les repas longs ?
Mieux vaut prévoir un repas court. Si le repas s’éternise, inciter la personne Alzheimer à quitter la table quand elle ne se sent plus à l’aise, à aller faire la sieste, quitte à revenir plus tard.
Que faire si le malade devient agressif ?
Rester calme, le mettre à l’abri des stimuli, le rassurer sans le contrarier.


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